Comprendre l’homme à partir de l’expérience
A propos du texte “Enquête sur l’entendement humain” de David Hume, 1997.
Dans le texte “Enquête sur l’entendement humain” (1), Hume tente de comprendre l’homme à partir de l’expérience. Son projet de départ est d’appliquer la méthode expérimentale à la nature humaine et de revendiquer les phénomènes contre les hypothèses dans le domaine physique. (Il en fera de même concernant le domaine moral, dans “l’Enquête sur les principes de morale”). Il essaie donc de comprendre l’homme dans ses actions.
L’expérience part toujours d’une perception originelle, qui nous fait voir, toucher, désirer etc. Penser ne vient qu’après, et c’est alors l’esprit qui se souvient, retenant en lui les impressions passées pour en former des idées. Les deux noms de l’expérience sont dès lors “impression” et “idée”. Les idées viennent après les impressions, étant moins vives que le point de départ empirique. Par la suite, la pensée établit des connexions entre les idées.
Hume énumère trois connexions exprimant ces modalités d’opération de la pensée : ce sont la ressemblance, la contiguïté et la relation de cause à effet. Ces trois modalités ne sont pas à comprendre dans un sens purement empirique et dogmatique : Hume précise que cette volonté de classement est une volonté de susciter la curiosité humaine. Les opérations de l’esprit tirent leur origine de l’expérience et l’expérience demeure leur seul guide. Au-delà de cette expérience concrète, l’esprit se perd. Dans les limites de l’expérience il doute, mais ce doute n’est pas de l’ordre de la déception, mais plutôt de l’ordre d’une instruction active de l’homme à partir de l’expérience mondaine. Dans la section IV, “Doute sceptique concernant les opérations de l’entendement”, Hume fait le développement suivant : notre entendement se rapporte à différents objets, notamment les relations d’idées (p.ex. l’arithmétique) et les faits (p.ex. le fait que le soleil se lève tous les matins). A partir de tels faits notre entendement aboutit à établir des relations de cause à effet, l’aboutissement final étant l’expérience, car c’est elle qui, en fin de compte, fonde nos raisonnements et conclusions à propos de telles relations.
Car seule l’expérience m’autorise à inférer un effet d’une cause.
(Je suis convaincu que le soleil se lèvera demain, et pourtant je sais que le contraire est possible, mais ce n’est pas le pouvoir de la raison qui me fait croire qu’il se lèvera, mais mon expérience.) Notre entendement déduit donc de “tel objet a depuis toujours exercé tel effet” la proposition “je prévois que d’autres objets similaires en apparence au premier auront des effets semblables”.
A ce propos, Hume donne l’exemple du pain : nos sens nous révèlent sa couleur, son poids, sa consistance, mais ni nos sens ni notre entendement ne nous livrerons jamais les qualités qui font que le pain est en effet sain pour l’homme. Et pourtant, à chaque fois que nous en mangeons, nous constatons que cela nous nourrit et nous en déduisons qu’il en sera toujours ainsi. Or, il n’y a pas de connexion réelle entre les qualités sensibles du pain et ses “pouvoirs secrets” (“secret powers”).
Demeure donc une question essentielle: qu’elle est la fondation de toutes ces conclusions que tire notre expérience? C’est à ce niveau-ci que Hume fait intervenir le doute, car ma raison se trouve incapable de démontrer que le soleil se lèvera demain.
Pourtant, l’homme persiste dans sa croyance, et en ce sens on peut dire que l’action l’humaine combat l’ignorance, et le doute se trouve relativisé au niveau empirique de la quotidienneté.
Dans la section V du texte, “Solution sceptique de ces doutes”, Hume donne ce principe qui permet de formuler des conclusions à partir de prémisses si incertaines: C’est l’habitude (“custom” ou “habit”). Le principe d’accoutumance constitue le grand guide de la nature humaine, nous faisant anticiper le futur à partir de la répétition dans le passé. Et c’est en fait notre imagination qui possède ce pouvoir illimité de mélanger et puis séparer les idées, c’est elle qui peut façonner n’importe quoi dans notre esprit. En ce sens l’homme est un être irrationnel mais hautement imaginatif.
C’est donc cela l’explication de ces déductions douteuses : quand nous nous rappelons un objet, notre accoutumance fait immédiatement que notre imagination façonne un objet qui est proche de l’objet remémoré. La croyance (et non la raison) guide nos actions, elle nous fait adhérer à ce qui n’est pas encore comme si il était déjà (avoir une croyance, c’est avoir une idée qui se rapproche de l’impression en vivacité).
Donc l’homme a acquis de l’expérience quand, par habitude, il a appris à en tirer des leçons pour l’avenir.
Dès lors l’expérience n’est pas pour Hume le lieu privilégié de la révélation du vrai, mais un outil permettant à l’homme de laisser libre cours à son imagination qui structure le monde au quotidien. Hume distingue bien le doute radical, réservé au domaine philosophique, des affaires humaines de la quotidienneté, permettant un accès à l’expérience dans toute sa diversité.
(1) HUME,David; “An enquiry concerning human understanding”, Sect.IV.
“Sceptical doubts concerning the operations of the understanding”, sect.V. “Sceptical solution of these doubts”; Encyclopaedia Britannica, Chicago 1952.
I believe I can see the future
NIN
‘Cause I repeat the same routine
I think I used to have a purpose
But then again, that might have been a dream
I think I used to have a voice
Now I never make a sound
I just do what I’ve been told
I really don’t want them to come around, oh no
Every day is exactly the same
Every day is exactly the same
There is no love here and there is no pain
Every day is exactly the same